INVESTIGADORES
CAMPORA magdalena Teresa Maria
artículos
Título:
Une grande image du présent. Balzac lecteur imprévu de l'Argentine (1940-1950)
Autor/es:
CÁMPORA, MAGDALENA
Revista:
L'Année balzacienne 2011
Editorial:
Presses Universitaires de France
Referencias:
Lugar: Paris; Año: 2011 p. 491 - 518
ISSN:
0084-6473
Resumen:
Le désir de Balzac de maîtriser l´oeuvre et de fixer le corpus dans une forme par lui déterminée, en fonction d´unités qu´il a lui-même pensées et définies (les Scènes, les Études) est bien connu; cette organisation est non seulement structurelle, mais encore éditoriale : fort de son expérience d´éditeur, Balzac intervient sur la disposition, la typographie, la longueur, voulant s´occuper même de la fourniture du papier et de l´impression. Ce ferme exercice de la volonté auctoriale relève d´une vision particulière de ce que doit être l´oeuvre dès qu´elle quitte la férule de l´auteur : "histoire du coeur humain" et ´histoire générale de la Société´, La Comédie humaine s´inscrit selon l´Avant-propos dans une téléologie et une dynamique interne qui ne sauraient être modifiées au moment de l´édition sans porter préjudice au projet entier de l´historien des moeurs. Certes, il importe moins ici de croire au fabuleux exercice rhétorique qui établit rétrospectivement une sévère cohérence, que de signaler le lien étroit tissé par Balzac entre édition matérielle, structure de l´oeuvre et interprétation de La Comédie humaine comme diagnostic indivis de la société. Car c´est justement ce lien qui est bouleversé dans la réception de Balzac en Argentine entre les années 1940 et 1950. Durant cette période de grande productivité éditoriale, la première de circulation massive et soutenue des romans balzaciens en Argentine, la publication de certains titres devient une valeur sûre et la "tribu de sauvages si célèbres aux environs de Buenos Aires" dont Gobseck avait cherché l´or se met à faire (un peu) d´or sur Balzac : six versions de El lirio en el valle entre 1944 et 1949, cinq de Eugenia Grandet à la même époque, cinq autres de La piel de zapa, auxquelles il faut ajouter des éditions et des nouvelles traductions de La prima Bette, La solterona, El cura de Tours, La mujer de treinta años, Honorina, La duquesa de Langeais. On le voit, à Paris comme à Buenos Aires, Balzac est un auteur que lisent les femmes, même si la forme éditoriale des publications argentines accentue sensiblement la lecture de genre : esthétique de roman à l´eau de rose, inclusion dans des collections de ´littérature féminine´, choix privilégié de titres aux noms d´héroïne, transformation des textes en manuels descriptifs de ´la vie parisienne´ et de ´la vie élégante´. Cette publication ciblée de La Comédie humaine modifie le projet exposé dans l´Avant-propos tout en créant de nouveaux effets de lecture. En même temps, et ce n´est pas là la moindre des contradictions de Balzac en Argentine, cette dilution éditoriale de l´oeuvre est tempérée par l´affirmation constante de l´unité et de l´efficacité de La Comedia humana comme radiographie intégrale de la société. Préfaciers, essayistes, traducteurs et éditeurs, souvent anonymes, suivent au pied de la lettre les instructions de lecture laissées par Balzac, ce au point de penser que le grand oeuvre pourrait être utile à l´organisation politique et sociale d´un pays ´jeune´ comme l´est encore l´Argentine des années 1940. Aussi trouvera-t-on très tôt, autour de Balzac, des préfaces, des essais, des quatrièmes de couverture imbriquant le texte fictionnel dans des analyses plus ou moins poussées de modèles de société (balzacienne) à appliquer ou à éviter. ´La Comédie humaine´ comme traité politique et comme manuel du bien vivre: c´est de ces dimensions pragmatique et sapientielle de l´oeuvre de Balzac en Argentine dont nous voudrions ici nous occuper.