"Management, productivité, souffrance et suicide: France Télécom aux deux marges de l'Atlantique".

DAMIÁN PIERBATTISTI

París

Taller; "Rencontre de Jeunes Chercheurs"; 2010

Conservatoire National des Arts et Métiers. Chaire "Psychanalyse, Santé, Travail". Dir: Prof. Christophe Dejours.

Les nombreux suicides à France Télécom, qui ont commencé à être enregistré très soigneusement par l’Observatoire du Stress et des Mobilités Forcées depuis janvier 2008, ont réussi à mettre en question les caractéristiques les plus remarquables d’un modèle de gestion des travailleurs dont son inhumanité paraît avoir été largement normalisée. Elles sont nombreuses les recherches et les analyses sérieuses et rigoureuses qui ont commencées à rendre observable cette problématique depuis des points de vues et de perspectives différentes (Baudelot y Establet, 2006; Burgi, 2007; Burgi, Crinon et Fayman, 2008 ; Decèze, 2008; Dejours, 2007, 2009; Du Roy, 2009). Pourtant il y a un trait concernant cette problématique spécifique qu’il faut remarquer car il est passé inaperçu : le modèle managérial qu’en France aujourd’hui se trouve dans l’oeil de la tempête s’est imposé en Argentine pour la première fois il y a exactement vingt ans, lors de la privatisation de l’Entreprise Nationale des Télécommunications (ENTEL) dont France Télécom a été l’une des deux entreprises bénéficiaires. Donc pour connaître l’ampleur de l’offensive entrepreneuriale qui secoue actuellement la vie académique, politique et syndicale française il faut se remonter une bonne vingtaine d’années. Connaître la forme qu’a assumée l’imposition d’une nouvelle culture entrepreneuriale en Argentine dès l’instant même de la privatisation d’ENTEL nous permettra d’avoir dans la perspective historique nécessaire pour comprendre la mise en scène des dispositifs, des mécanismes, des tactiques et la stratégie d’une entreprise visant à faire augmenter la productivité de la force de travail, réduire de manière “draconienne” le nombre de travailleurs hérités par l’ancienne entreprise de l’État et leurs conséquences dans un milieu traversé par une culture du travail du métier et, notamment, du “travail bien fait”. De cette manière le public français aurait les moyens d’évaluer les continuités, prolongements et ruptures qui se trouve dans le modèle managérial imposé à France Télécom de nos jours. Dans cet article on va essayer de déployer, quoique fort résumé, les noeuds de notre recherche concernant la privatisation des télécommunications en Argentine et l’imposition d’un modèle managérial qui a été partagé, même si avec certaines nuances qui ne font pas au fond de la question, aussi pout Telefónica de Argentina que par France Télécom, les deux entreprises achetant l’ex-ENTEL.