Le « turco Julian », un bourreau de l'Olimpo

LUCIANA MESSINA

Metz

Jornada; 3er Coloquio Internacional «Qualifier, disqualifier, requalifier des lieux de détention, de concentration et d?extermination. Figures emblematiques, Movilisations collectives»; 2009

Université Paul Verlaine-Metz

Dans ce travail, nous nous proposons de problématiser le cas d´un personnage, le « Turco Julián » (« Julian le Turc »), qui est devenu un emblème du bourreau-tortionnaire de la dictature militar en Argentine (1976-1983). Nous ne cherchons pas à contribuer à son emblématisation. Nos estimons, au contraire, qu´il s´agit d´un bourreau de plus, comme la plupart des membres des Forces Armées, de Sécurité et des policiers qui ont participé au système répressif pendant la dernière dictature en Argentine. Nous avons néanmoins choisi ce cas en particulier pour deux raisons fondamentales. Tout d´abord, car nous pensons que le « Turco Julian » concentre une série d´éléments qui permettent de penser la figure de l?agent de la répression, et, par extension, elle permet d´établir une réflexion sur l´action répressive dans son ensemble. Ensuite, parce qu´une analyse de son cas nous permettra de suivre le chemin parcouru par de nombreux tortionnaires après la dictature militaire. Ce chemin commence pendant la transition démocratique avec des citations à comparaître pour des causes pénales, se poursuit avec l?impunité des crimes de la dictature à la fin des années 1980 et pendant les années 1990 et elle finit avec la récente ouverture des causes judiciaires, les procès et les condamnations de certains agents de la répression. Le parcours post-dictatorial du « Turco Julian » passe par des épisodes clefs de l´histoire récente de l´Argentine. Il s´agit de moments qui sont le reflet des discontinuités et des virages des prises de position de la société politique et de la société civile dans son rapport au passé récent. Par ailleurs, un autre élément nous pousse à nous intéresser à ce cas: le « Turco Julian » a fait partie des tortionnaires de l´ex-centre clandestin de détention l´Olimpo, endroit où actuellement se met en place un lieu de mémoire. Dans ce sens, nous pensons que l´analyse de son cas nous permettra de voir dans quelle mesure un personnage qui est devenu un symbole de la répression donne, ou non, une certaine visibilité sociale au lieu dans lequel il a exercé les pratiques délictueuses « grâce auxquelles il s´est fait connaître ». Pour aborder la problématique proposée, nous avons pris comme corpus principal d´analyse des articles de journaux publiés à partir de 1995 et jusqu´à nos jours. Nous avons aussi travaillé sur les témoignages des survivants des centres clandestins dans lesquels le « Turco Julián » a travaillé et sur les causes judiciaires qui le concernent.