Cahpitre 70: Argentine : conflits entre deux logiques et récurrence des crises

NEFFA, JULIO CÉSAR; LUDMER, GUSTAVO

Théorie de la régulation, un nouvel état des savoirs

Dunod

Año: 2023; p. 557 - 583

Les gouvernements de Juan Domingo Perón (1946-55 et 1973-74) ont installé un modèle économique que nous appellerons « justicialiste » basé sur l’intervention de l’État national pour diriger l’industrialisation du pays et dynamiser de manière autonome son insertion dans la division internationale du travail. Pour cela, le gouvernement a renforcé l’activité économique de l’État en tant que producteur en nationalisant les services publics étrangers, en réglementant les prix des marchandises exportées pour s’approprier une partie de la rente agraire, en soutenant le développement de l’industrie nationale par l’augmentation de la demande intérieure et des crédits promotionnels, en réglementant les formes de concurrence sur le marché intérieur pour lutter contre l’agio et la spéculation poussée par les grandes entreprises industrielles, en nationalisant les dépôts bancaires et en contrôlant les taux d’intérêt et le taux de change. Par ailleurs, on a aussi modernisé la relation salariale avec des réformes « pro ouvrier » du droit du travail et de la sécurité sociale, en renforçant les syndicats et en promouvant la négociation collective. Cela a donné comme résultats, d’une part, une forte opposition des chefs des grandes entreprises et, d’autre part, une hausse des salaires réels, des avancements dans la couverture du système de sécurité sociale et une plus grande participation des salariés dans la distribution des revenus.C’est à partir de cette expérience historique capitale que se situent les logiques des deux modes de développement qui ont dominé la vie économique de l’Argentine, de 1975 à nos jours