Une alpha-galactosidase de Lactobacillus fermentum comme modele pour demontrer la capacite de bacteries lactiques a supplementer des deficiences enzymatiques digestives chez l´homme.

CLIER F.,; LEBLANC J.G.,; BENSAADA M.,; SILVESTRONI A.,; SAVOY DE GIORI G.,; JUILLARD V.,; SESMA F.; RABOT S.,; PIARD J.C.

Nantes, France

Congreso; VII me Congres National de la Societe Francaise de Microbiologie; 2007

Societe Francaise de Microbiologie

Les composants du bol alimentaire sont pour la plupart dégradés dans l’estomac et l’intestin grêle. Cependant, certains d´entre eux ne peuvent l´être, du fait de déficiences tissulaires (pancréatiques ou intestinales) en certaines enzymes. Ces déficiences sont constitutives de l’espèce humaine ou résultent de pathologies. Pour évaluer la capacité de bactéries alimentaires ad hoc à supplémenter ces déficiences, nous avons retenu comme modèle les a-galactosides, sucres dégradés par l´a-galactosidase (a-Gal). Du fait de l’absence de sécrétion d’a-Gal chez l’homme, ces sucres non catabolisés dans l’intestin grêle sont déversés dans le côlon où ils sont fermentés par le microbiote. Cette fermentation conduit à une forte production de gaz et, par là même, à différents symptômes d’inconfort digestif (ballonnements, flatulence, diarrhée). Notre raisonnement est que l’apport d’une a-galactosidase dans l’intestin grêle doit permettre de digérer les a-galactosides dans ce compartiment digestif et, ainsi, d’éviter leur fermentation dans le côlon et la production de gaz qui en résulte. Un criblage d’une collection de lactobacilles basé sur la production d’a-Gal a permis de sélectionner la souche Lactobacillus fermentum CRL722 dont l’a-Gal est active vis-à-vis du raffinose et du stachyose, les 2 a-galactosides les plus abondants du soja. Cette enzyme a été caractérisée et montre une activité élevée aux valeurs de pH et de température de l’intestin grêle. Pour prouver le concept, nous avons développé une stratégie expérimentale basée sur l’utilisation d´un modèle animal à microbiote intestinal contrôlé. Il s´agit de rats initialement sans germes, dont nous avons colonisé le tube digestif avec une souche de Clostridium butyricum, espèce bactérienne capable de fermenter les α-galactosides en produisant de grandes quantités de gaz. Nous avons administré à ces rats la souche L. fermentum CRL722 par gavage oro-gastrique (n=6, dose=108 UFC/rat) . Les animaux ont reçu simultanément du lait de soja enrichi en stachyose et raffinose. Nous avons comparé les rats ainsi traités à un groupe "témoin positif" ne recevant que la préparation à base de lait de soja, et à un groupe "témoin négatif" recevant une préparation appauvrie en α-galactosides, grâce à l’incubation préalable du lait de soja avec une a-Gal végétale. Immédiatement après gavage, les animaux ont séjourné pendant 10 h dans des chambres respiratoires étanches. Ce dispositif permet l´accumulation du dihydrogène, gaz qui est excrété par voies respiratoire et rectale et qui résulte de la fermentation des glucides, dont les a-galactosides, par les bactéries intestinales. L´administration de la souche L. fermentum CRL722 a permis de réduire de l’ordre de 40 % l´excrétion de dihydrogène observée chez les rats "témoins positifs", l´excrétion observée chez les rats "témoins négatifs" étant, comme attendu, négligeable. Ces résultats validant notre modèle d’étude, nous avons voulu nous rapprocher dans un second temps des conditions de l’environnement digestif humain. Pour cela, le même type d’expérimentation a été mené chez des rats hébergeant un microbiote fécal humain. Nous avons observé dans ces conditions que l’administration de la souche L. fermentum CRL722 réduisait de plus de 60 % la flatulence induite par la consommation de lait de soja. Ces résultats valident le concept de supplémentation enzymatique digestive par les bactéries lactiques et ouvrent une nouvelle voie thérapeutique dans le cadre de pathologies conduisant à des déficiences enzymatiques sévères.