Etude du rituel chez les chasseurs-cueilleurs. Apport de l’ethnoarchéologie des sociétés de la Terre de Feu.

MANSUR MARÍA ESTELA; PIQUÉ RAQUEL Y VILA MITJA ASUNCIÓN

Chasseurs-cueilleurs. Comment vivaient les hommes du Paléolithique supérieur ? Méthodes d'analyse et d'interprétation en préhistoire

Editions du CNRS

Lugar: Paris; Año: 2006;

RÉSUMÉ L’étude de tout ce qui se rattache au monde symbolique, en tant que reflet de l´idéologie, a toujours été considérée importante en Préhistoire. Cependant dans la pratique, dans le cas de l´étude du Paléolithique, nous nous sommes limités à interpréter en tant que tels seulement les registres archéologiques exceptionnels. Ainsi, l´étude des aspects symboliques est abordée par opposition à l´idée préconçue d’«espace domestique» et donc en relation avec le caractère exceptionnel de certains contextes et matériaux. Des exemples en sont l´existence d´art mobilier ou rupestre, la présence d´enterrements, l´apparition de contextes archéologiques dans des situations spatiales particulières, tel le fond de grottes profondes, etc. Différentes interprétations ont été proposées pour ces contextes exceptionnels, souvent inspirées dans des exemples ethnographiques. Cependant les mêmes documents ou sources ethnographiques référées aux sociétés de chasseurs-cueilleurs qui ont servi pour ces interprétations, révèlent l’existence d’activités rituelles fondamentales pour le maintien de l’ordre social, qui ne produiraient pas un registre archéologique exceptionnel. Ce sont des activités de renforcement qui se caractérisent par leur régularité, bien qu´elles n´aient pas lieu à des moments et des endroits préétablis. Dans le but d’approcher à l’identification archéologique du rituel, au-delà de simples analogies actualistiques ou de la recherche de l´exception, nous avons abordé l´étude ethnoarchéologique du rituel dans la société Selknam de Terre de Feu. Cette société, ainsi que les autres qui ont occupé la zone des îles et archipels fuégiens, a été abondamment décrite par divers auteurs; il existe aussi un vaste échantillon de leurs outils et autres éléments matériels dans les musées ethnographiques, beaucoup de documents iconographiques, et les résultats de recherches archéologiques menées dans la région depuis plusieurs années. L´analyse de sources écrites et photographiques révèle l’importance d’une cérémonie en particulier, le Hain, qui était célébrée régulièrement, bien qu’à différents endroits, et qui demandait un investissement important de travail pour sa réalisation. Il fallait construire une grande hutte, des masques, qui pourraient être considérés comme des éléments exceptionnels, mais qui ne se conservent pas. ¿Quel serait donc le registre archéologique qu’on devrait attendre en telles circonstances? ¿Qu´est-ce qui permettrait de le reconnaître d´une occupation «domestique»? La recherche de réponses à ces questions a été à l’origine d’un projet de recherches ethnoarchéologiques et dans ce cadre, pendant les saisons 2003 et 2004, nous avons fouillé un site, où il y avait une structure de hutte qui correspondait aux descriptions de la hutte du Hain. Les matériaux récupérés pendant la fouille ne diffèrent pas du point de vue qualitatif de ceux connus pour d´autres sites de type campement; cependant l’analyse des matériaux et de leur distribution spatiale révèlent un mode de gestion des résidus et de l´espace différent de celui constaté dans tous les autres gisements de la région. Ces résultats permettent de proposer qu’il est possible d´identifier et d’étudier des contextes rituels par des méthodes strictement archéologiques.